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Archives de Catégorie: BIO

BIO : MATHIEU MATEGOT (1910-2001)

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Tour à tour décorateur, tapissier, ou encore fabricant de mobilier et de luminaires, Mathieu Matégot (1910-2001) n’a de cesse de créer tout au long de sa carrière. Dès la seconde partie des années 40, il se fait remarquer à travers la fabrication de petit mobilier et d’objets du quotidien en métal perforé auquel il donne toute sorte de forme, les seules limites étant celle de son imaginaire poétique. Il participe au renouveau de l’habitat d’après guerre avec une nouvelle forme d’expression, alliant élégance et originalité tout en utilisant des techniques de fabrication novatrices. Il façonne la tôle ajouré comme personne, lui conférant des formes quasi organiques et faisant de lui un véritable couturier du métal. Son esprit libre et précurseur fera de lui l’un créateur ayant marqué son époque d’une emprunte indélébile.
Portrait Mathieu Matégot

A DECOUVERTE DU METAL PERFORE

C’est lors de sa détention en Allemagne pendant la seconde guerre mondiale que Mathieu Matégot imagine ce qui deviendra plus tard sa marque de fabrique : le métal perforé. Dès 1945, Il commence à développer une ligne de petit mobilier incluant, des ranges revues, des portes parapluies, des corbeilles ou bien des caches pots en utilisant de nouvelles techniques pour plier le métal qu’il développe lui même au sien de son propre atelier. Il répond parfaitement à la demande de la reconstruction d’après guerre : du mobilier économique, sans fioritures et léger en rupture avec le style ornementale et imposant des décennies précédentes. Il rencontre un vif un succès, ses créations apportant une certaine poésie à la décoration des intérieurs avec des formes aérienne encore jamais vues jusqu’ici. En 1954 il développe également la tôle Java, sorte de plaque de métal ondulée complétée de trou laissant passer la lumière dans le cadre de luminaire ou bien de laisser apparaitre le contenant pour des portes revues par exemple. Il finira par breveter son invention sous le nom de rigitulle le 14 février 1952 avec la description suivante : « Métal perforé en feuilles, notamment en feuilles ondulées, meubles divers, paniers métalliques, corbeilles métalliques. »

LES MATERIAUX

Si la tôle perforée est intimement liée à la renommée et au rayonnement de Mathieu Matégot, ce dernier utilise également d’autres matériaux dans la fabrication de son mobilier comme le rotin qui est sa seconde matière de prédilection après le métal, il l’utilise  d’ailleurs dès le milieu des années 30 dans le cadre du montage de ses décors de théâtre. Le rotin est dans l’air du temps pendant les années 50 car financièrement accessible et disponible en quantité importante. Matégot ne s’y trompe pas et l’associe régulièrement dans le cadre de fabrication d’objets courants à base de métal perforé comme des plateaux ou des portes bouteilles ainsi que dans une très rare version de sa chaise Nagasaki. Il travaille également le cuir, le bois, la tôle émaillée et même le verre via des plateaux de tables qu’il ira même jusqu’à graver. Ce n’est qu’à la toute fin des années 50 qu’il s’intéresse à des matériaux plus chics comme le laiton, succombant aux sirènes de la mode caractérisée alors par un certain embourgeoisement.

LA LUMIERE SELON MATEGOT

Les luminaires occupent une place clé dans l’ameublement des intérieurs français d’après-guerre. Ils doivent évidemment faire office d’éclairage mais la diffusion de la lumière est étudiée avec finesse et rien n’ai laissé au hasard. A l’instar de ses contemporains Serge Mouille et Michel Buffet, les lampes de Matégot ne dérogent pas à la règle et procurent une réelle atmosphère  dans la pièce qu’ils occupent. L’utilisation de la tôle Java ainsi que du rigitulle sur les abats jours permettent une diffusion de la lumière tout en poésie et en légèreté, une façon d’éclairer encore inédite dans les années 50. Les suspensions satellites constituées d’une coque ovoîde en rigitulle complétée d’un réflecteur en tôle d’acier plié en sont la parfaite manifestation. Il dessine également la lampe à poser Bagdad en 1954, composée de plusieurs facettes de tôle perforée laquée surmontée d’une petite boule en laiton, cette pièce fut éditée en très peu d’exemplaire ce qui lui permet d’atteindre des records en salle de vente (entre 15000Eur et 25000Eur), par ailleurs, il arrive régulièrement d’en voir passer sur certains sites d’enchère en ligne, ne vous méprenez pas, il s’agit à chaque fois de grossières copies malheureusement.

Suspension satellite Mathieu Matégot 1950 - Artenchères

LA TAPISSERIE COMME FIL CONDUCTEUR 

On connaît Matégot en tant qu’artisan du métal dont il fera l’éloge tout au long des années 50, néanmoins, la passion qui animera le créateur du début à la fin de sa carrière c’est la tapisserie. Il découvre cet art à la fin des années 40 par l’intermédiaire de Jean Lurçat avant de le mettre entre parenthèse la décennie suivante pour s’adonner à la fabrication de mobilier. Ayant fait le tour de ce qu’il pouvait proposer en terme d’ameublement, il retourne à ses premières amours dès le début des années 60 sous l’égide de Denise Majorel. Il fait preuve d’un grande maîtrise de la discipline et est reconnu par ses pairs jusque dans le milieu des années 70, période à laquelle la tapisserie tombe quelque en désuétude. Il continuera à s’adonner à cet art jusque dans les années 90, donnant naissance à quelques 629 tapisseries originales tout au long de sa carrière.

Tapisserie Santa Cruz Mathieu Matégot 1950 - Piasa

INTERVIEW DE PHILIPPE JOUSSE – GALERIE JOUSSE ENTREPRISE

Vous avez écrit et édité le premier catalogue raisonné sur Mathieu Matégot en 2003, à quand remonte votre première rétrospective sur ce créateur?

Nous avons réalisé notre première grande exposition sur Matégot à la Villa Noailles en 2002 mais nous avons commencé à collecter des pièces dès les années 80. Il nous a fallu un peu de temps avant de monter une exposition car les pièces maîtresses sont très rares, quelques fois fabriquées à moins de 10 exemplaires, il est donc assez difficile de réunir des séries complètes comme le salon Nagasaki ou Santiago par exemple. Nous avons exposé une seconde fois une sélection de mobilier de Matégot en 2012.

En quoi Matégot se différencie-t-il des autres designers de sa génération?

Il se singularise de ses contemporains à plus d’un titre, il débute en tant que peintre décorateur de théâtre et tapissier avant la seconde guerre mondiale et poursuit sa carrière dans la  production de mobilier pendant les années 50. C’est un esprit libre, qui s’occupera intégralement du processus de fabrication de ses créations, du dessin à la distribution en passant par la fabrication et la promotion. Son mobilier, pouvant être utilisé aussi bien  à l’intérieur qu’à l’extérieur est emprunt de poésie et d’une certaine légèreté conférée par la transparence de son métal perforé.

Suites aux différentes expositions et publications parues, pensez-vous qu’il est aujourd’hui plus facile de chiner des pièces de Matégot?

Les livres et catalogues peuvent effectivement faciliter l’identification des pièces, il n’en reste pas moins que certaines créations sont devenues introuvables car éditées à très peu d’exemplaire à l’origine comme ses salons de jardin ou bien ses luminaires. Par ailleurs, sa côte n’a cessé d’augmenter au fur et à mesure des années. En ce qui concerne le petit mobilier d’ameublement comme les portes parapluies ou les portes revues par exemple, les trouvailles sont encore possibles.

Quelles sont la ou les pièces que vous affectionnez le plus?

J’ai une faiblesse pour la chaise Nagasaki et ses lignes très organiques, l’ensemble Kyoto et les suspensions satellites dont le dessin est d’une rare élégance diffusant une lumière douce à travers le rigitulle, un rapport très intéressant entre l’ombre et la lumière.

CHINER DES PIÈCES DE MATEGOT

S’il peut apparaitre relativement aisé de chiner des pièces de Matégot étant donné le nombre important de ses créations au cours des années 50 notamment en terme de petit ameublement comme des plateaux, des caches pots, ou encore des portes revues, il y a quelques pièges à éviter. En effet, une grande majorité du mobilier en métal perforée attribuée à Mathieu Matégot sur le web n’est en réalité jamais sorti de ses ateliers, il faudra donc affiner votre œil en vous procurant les publications existantes sur son travail ainsi qu’en manipulant des pièces originales pour vous familiariser suffisamment pour ne pas vous faire duper. Il existe de nombreuses copies ou inspirations approximatives de Matégot sur le marché, néanmoins lorsque l’on s’attache aux détails, les soudures et les proportions sont très rarement de la même précision et de la même finesse que les créations originales. De plus si vous tombez sur une pièce que vous identifiez comme étant authentique et que le prix correspond peu ou prou à sa côté moyenne, veillez à bien vérifier que la peinture soit d’origine, en cas de revente, c’est un atout indéniable. Pour ce qui est du mobilier plus imposant comme les assises et les tables, ce sera un peu plus difficile car ce sont des pièces diffusées à très peu d’exemplaires en leur temps et qu’ il en reste donc quasiment plus sur le marché de la seconde main, d’autant que pour tout ce qui est mobilier de jardin, la corrosion aura souvent eu raison du métal.

LES REEDITIONS GUBI

Fondée en 1967 par le couple danois Gubi & Lisbeth Olsen, la maison GUBI réédite une sélection de meubles et d’objets de Mathieu Matégot depuis quelques années maintenant. Au catalogue de Gubi vous trouverez : la chaise et le tabouret Nagasaki, la table Kangourou, les étagères Dédal, une desserte sur roulettes, une table d’appoint en verre fumé, l’étagère Demon, un porte manteau, ainsi que le fauteuil et la table basse Copacabana. Les célèbres suspensions satellites en rigitulle sont également prévues et déjà référencées chez les distributeurs, cependant, la production est retardée car le résultat des premiers prototypes n’est pas satisfaisant. Cela met une fois de plus en avant l’inventivité et l’aspect précurseur du travail de Matégot car 70 ans plus tard, alors que les techniques de fabrication ont considérablement évolué, Gubi ne parvient pas à maitriser le rigitulle. Au niveau des tarifs, nous sommes bien entendu à des niveaux de prix beaucoup plus abordables que des pièces originales mais avec un intérêt bien moindre, comme pour toute réédition, la patine étant absente tout comme le côté historique de l’objet. Ce qui peut apparaitre un bon compromis, comme par exemple l’achat d’une étagère Dédal neuve chez l’éditeur danois au prix de 290Eur (contre 800Eur à 1200Eur en moyenne pour une édition originale) se révèle souvent être une erreur car on s’en lasse très vite et le prix à la revente diminue au moins de moitié par rapport au prix retail. Je ne saurais que trop vous conseiller de vous armer de patience afin de prendre le temps de dénicher une version d’époque pour un budget raisonnable.

BIBLIOGRAPHIE

Mathieu Matégot – Philippe Jousse et Caroline Mondineau – Edition : Galerie Jousse Entreprise – 2003

Mathieu Matégot – Patrick Favardin et Galerie Matthieu Richard – Edition : Norma – 2014

Crédit photo : Galerie Matthieu Richard, Artcurial, Piasa, Cornette de St Cyr, Tajan, Aguttes, Leclere MDV, Wright Auction.

BIO : FLORENCE KNOLL (1917-2019)

Knoll est certainement l’éditeur de mobilier le plus emblématique depuis l’après-guerre. Quelques-unes des plus grandes icônes du design du XXème siècle sont sorties de ses usines comme la chaise tulipe d’Eero Saarinen, le fauteuil wassily de Marcel Breuer ou bien les assises sculpturales en fil d’acier d’Harry Bertoia. Derrière cette réussite, un couple mais surtout une femme : Florence Knoll (1917), qui vient de s’éteindre à 101 ans, révolutionna la notion de mobilier mais également d’aménagement avec ses idées novatrices alliant le talent des plus grands créateurs modernistes aux dernières technologies de production. L’équilibre parfait entre l’art et l’industrie, entre la fonction et l’esthétique.

Naissance de l’architecture d’intérieur

Hans Knoll (1914-1955) fonde sa société en 1938 et rencontre Florence Schust en 1941 avant de l’épouser 5 ans plus tard. Dès le début des années 40, ils souhaitent développer l’ameublement moderne aux Etats Unis et pour se faire, décident d’engager les meilleurs designers de l’époque : Jen Risom, Eero Saarinen, Isamu Noguchi, Mies Van Der Rohe ou encore Charles Pollock. Le résultat est immédiat car Florence Knoll développe en parallèle la notion d’architecture d’intérieur en proposant des solutions complètes à ses clients via des plans d’aménagements, la création de leur propre tissu d’ameublement « Knoll Textill » ainsi que l’ouverture de showrooms dans les plus grandes villes américaines ainsi qu’à Paris.

Le mobilier Florence Knoll

Non contente d’être la directrice artistique du plus célèbre éditeur de mobilier américain d’après-guerre, Florence Knoll commence à dessiner elle-même du mobilier dès 1945, notamment ses premières enfilades à portes coulissantes en raphia et poignées en cuir. Elle propose par la suite, au milieu des années 50, sa ligne « parallel bar » et sa série « T angle » composées d’assises et de tables, toutes ces pièces ayant pour point commun des lignes simples et sans fioritures alliant fonctionnalité et modernisme, le style Florence Knoll. Nul besoin de reconnaissance ou bien  de rejoindre les illustres créateurs de son écurie, l’idée étant seulement de répondre à un besoin en terme d’aménagement lorsqu’elle ne trouve pas ce qu’elle cherche dans son catalogue ou bien auprès des designers de la marque. Ses pièces sont toujours distribuées par Knoll aujourd’hui même si les lignes ont évolué et que les modèles diffèrent des créations originales afin de s’adapter aux époques. Pour une paire de fauteuils parallel bar dans un bon état d’origine, il faut compter entre 1500EUR et 2500EUR, les versions actuelles étant distribuées dans un tarif avoisinant les 5000EUR la pièce. Les tables basses et petites tables d’appoints quant à elle, se chinent à partir de 150EUR, les versions à plateau marbre étant les plus chères et les plus prisées. Pour une enfilade avec porte en raphia, les prix s’échelonnent entre 1800EUR et 3000EUR en fonction de l’état de conservation.

Le mobilier en fil d’acier

Si le banc composé de 2 piètements métalliques en « Y » surmonté de latte de bois est la première création issue de la collaboration entre Harry Bertoia (1915-1978) et le couple Knoll en 1952, c’est bien avec ses assises en fils d’acier que le sculpteur et designer italien obtient sa renommée internationale. Dès la sortie de ses chaises « wire » et de ses fauteuils diamant, entièrement façonnés à la main pour les premières versions, le succès est immédiat. Alliant pureté et légèreté, les créations de Bertoia détonnent avec ce qui se fait à l’époque, ce qui ne les empêchent de rapidement trouver la voix de la production en série. Toujours en production actuellement, le prix d’un fauteuil diamant neuf est de 2200EUR quant la côte d’une version originale s’évalue à 700EUR. Avis aux chineurs, veillez à bien vérifier l’état des soudures avant tout achat, tout spécialement sur les bords des chaises et à la base des dossiers, c’est le petite point faible des versions très anciennes.

Une dizaine d’années plus tard, en 1966, c »est l’architecte américain Warren Platner (1919) qui propose une ligne de mobilier sculpturale très chic en fils d’acier cintrés, cette nouvelle technique de fabrication permettant à Platner de compléter son offre avec des tables basses, des guéridons et des tables à manger, là où son collègue Bertoia s’était arrêté aux assises. La relative complexité dans la fabrication de ces pièces ne freine pas leur succès, néanmoins, le coût s’en ressent clairement, encore aujourd’hui. Il faut compter presque 8000EUR pour un grand fauteuil neuf et un peu moins de la moitié pour une version originale, l’avantage étant la casi absence de copies sur ces modèles ou alors des contrefaçons flagrantes. Notez que toute la gamme se décline en 2 finitions : bronze métallique peint ou bien nickel brillant verni.

La chaise tulipe en 1957

Si l’on devait résumer l’aventure Knoll en une seule pièce, ce serait surement celle-la. Florence Knoll rencontre Eero Saarinen (1910-1961), au même titre qu’Harry bertoia d’ailleurs, lors des ses études à l’institut Cranbrook dirigé par le propre père de Saarinen. Le créateur américain d’origine finlandaise travaille déjà depuis quelques années avec le couple Knoll lorsqu’il décide de créer toute une gamme de mobilier doté exclusivement d’un piètement centrale afin d’alléger les intérieurs, chose qui n’existait pas encore dans les années 50. C’est ainsi que la chaise tulipe est née composé d’un piètement centrale en fonte d’aluminium recouvert de rislan assurant une bonne stabilité grâce au poids surmonté d’une coque en fibre de verre moulée et renforcée. Elle peut être pivotante et accueille une galette de mousse alvéolé recouverte d’un lainage. On assiste alors à une petite révolution dans le monde du design américain et la chaise tulipe devient vite un best-seller qui ne se dément toujours pas de nos jours, les clients la voient comme une création futuriste dont la forme et le piètement sont entièrement pensés pour faciliter la vie quotidienne de son utilisateur. Encore une fois, Knoll tape dans le mille. Toujours au catalogue, une chaise de Saarinen est affichée à 1300EUR, une version ancienne peut se trouver pour 400EUR.

Marcel Breuer et son fauteuil wassily

On peut considérer que le célèbre fauteuil wassily a eu 3 vies depuis sa création par l’hongrois Marcel Breur (1902-1981) en 1925. En effet, il est tout d’abord édité entre 1925 et 1960 chez Thonet avant de passer sous licence Gavina SPA jusqu’en 1968, date à laquelle l’éditeur italien est racheté par Knoll qui produit cette assise en continu depuis. ll devient très vite un classique de la marque car il répond parfaitement à 2 grandes exigences du fabricant américain : des lignes modernistes et intemporelles alliées à un montage se prêtant parfaitement à la fabrication en série. Nommé wassily en hommage au peindre Kandinsky, ce fauteuil est constitué d’un armature tubulaire héritée du mouvement Bauhaus complétée d’une assise, d’un dossier et d’accoudoirs en croûte de cuir. Première création officielle de Breuer, le wassily est victime de son succès et n’a malheureusement pas échappé à la contrefaçon, pour vous éviter toute mésaventure, sachez que les éditions Knoll sont gravées du logo de l’éditeur ainsi que d’un numéro de série sur l’armature, et que le montage ne doit laisser apparaitre aucune visserie. Un modèle neuf vous coutera autour de 2100EUR quand une version d’époque, à partir de 1968 trouvera preneur pour 600Eur en moyenne.

Le culbuto ou l’exception française.

C’est la seule création d’un designer français à avoir été éditée par knoll à ce jour. Le projet de culbuto nait dans l’imaginaire de Marc Held (1932) en 1967 et prendra 4 ans avant d’être édité, le créateur devant revoir sa copie plusieurs fois. S’inspirant du fauteuil œuf du danois Arne Jacobsen, le français souhaite créer un fauteuil à bascule dépourvu de pied. Lors de sa présentation chez Knoll à sa sortie, c’est la douche froide, les responsables de Knoll France refusent le projet, trop éloignée de l’esprit de la maison. Heureusement, Florence Knoll, de passage sur la capitale, l’essaye et l’adopte ! Relatif échec commercial à sa sortie, c’est un fauteuil qui jouit d’une grosse côte d’amour aujourd’hui, comptez 3500EUR pour un petit modèle et 5000EUR pour la version haut dossier. En collaboration avec sa fille Marion, Marc Held réédite 12 exemplaires fidèles à son prototype dit « primo culbuto » en 2013, ces versions sont dotées d’accoudoirs plus fins que les modèles classiques ainsi que d’un dossier beaucoup plus large en forme de pétale. Commercialisées 12000EUR à leur sortie il y 4 ans, ces versions sont introuvables aujourd’hui et ont surement dû atterrir dans des collections privées qu’elles ne sont pas prêtes de quitter.

Edition ancienne ou réédition?

Devant la multiplication des rééditions, la question qui revient souvent est : faut-il privilégier une pièce ancienne ou bien céder aux sirènes de du meuble neuve. Au delà de l’intérêt évident de posséder une pièce historique avec une histoire et une patine, il y a des arguments beaucoup plus pragmatiques à considérer lorsque que vous choisissez d’acquérir du mobilier édité par Knoll. Niveau tarif pour commencer, à part quelques rares exceptions, une pièce vintage vous coutera en générale entre un tiers et la moitié du prix neuf. Ensuite, la disponibilité, les délais de fabrication dans le neuf se situent autour de 8 semaines, jusqu’à 12 pour certains meubles. Pour finir, pour une table d’Eero Saarinen avec un plateau en marbre par exemple, vous avez l’avantage de voir le plateau et donc d’apprécier la qualité du veinage dans le cadre d’un achat d’occasion, ce sera la surprise si vous passez commande directement chez l’éditeur.

Les contrefaçons

Tout comme dans la mode, le mobilier de luxe attire nombre de faussaires et Knoll n’en est pas exempt. Pour ce qui est du neuf, vous trouverez plus de site proposant des contrefaçons que l’inverse sur le web donc privilégiez les adresses ayant pignon sur rue et en cas de doute si le tarif est inférieur de plus de 15% du prix couramment constaté et bien passez votre chemin. Dans l’ancien, c’est beaucoup plus compliqué, les versions les moins tardives sont parfois estampillées comme la chauffeuse barcelona qui possède une gravure du nom de l’éditeur sur son piètement depuis une vingtaine d’années. Pour les chaises tulipes, la majorité possède la dénomination « Knoll International » embossé dans la fonte sous le pied, dans le cas contraire, c’est à votre oeil qu’il faudra vous fier en vérifiant que les matériaux correspondent à l’original et que le coussin de la galette est bien alvéolé s’il est toujours présent et n’a pas été refait. D’une façon générale, même s’il est très ancien, n’oubliez pas qu’il s’agit de mobilier de luxe donc méfiez des trops bonnes affaires et des vendeurs qui font semblant de ne pas savoir ce qu’ils vendent en proposant des prix « entre 2 » semant le trouble chez l’acheteur.

A lire :

Knoll Design – Eric Larrabée et Massimo Vignelli – Harry N. Abrams 1981

Marcel Breuer : Furniture & Interiors – Christopher Wilk – Museum of Modern Art  1985

Marc Held : Du design à l’architecture – Eric Germain – Norma 2009

Knoll – Brian Lutz – Editions du Chêne 2010

Eero Saarinen : Furniture for Everyman – Brian Lutz – Pointed Leaf Press 2012

The Life and Work of Harry Bertoia – Celia Bertoia – Schiffer Publishing LTD 2015

7. Chauffeuse barcelona - Mies van Der Rohe - Knoll 1929

BIO : PIERRE PAULIN (1927-2009)

Paulin_Pierre

Parmi les créateurs de mobilier français d’après-guerre, un nom s’impose : Pierre Paulin (1927-2009). Pourtant, si son talent et son influence sur l’habitat moderne sont aujourd’hui incontestablement reconnus, il aura fallu attendre l’année 1983 pour qu’une première exposition lui soit consacrée au musée des Arts Décoratifs, à Paris. Trente ans plus tôt, en 1953, au Salon des Arts Ménagers, le designer expose un mobilier fonctionnel destiné aux logements collectifs. Il est alors repéré par la firme Thonet et par le fabricant de mobilier Meubles TV qui commencent à l’éditer. Passage ensuite chez les Hollandais d’Artifort à partir de 1960, pour une quinzaine d’années de fructueuse collaboration. Pierre Paulin y imagine des pièces révolutionnaires pour leur époque, tant au niveau des matériaux utilisés, des lignes, que des techniques de fabrication. Des modèles devenus aujourd’hui iconiques.

De l’école Camondo au Salon des Arts ménagers

En 1949, le jeune Paulin est victime d’un accident au bras droit. Obligé d’interrompre une carrière de sculpteur à laquelle il se destinait, il intègre l’école Camondo pour apprendre le dessin. Son professeur Maxime Old (1910-1991), célèbre décorateur français, le repère et l’encourage à rejoindre le giron d’un autre enseignant, Marcel Gascoin (1907-1986), maître du mobilier de reconstruction. Pierre Paulin y retrouve les futurs «modernistes», Pierre Guariche, Joseph-André Motte ou encore Michel Mortier, dont les créations, empreintes de rigueur, d’élégance et de nouveauté, marqueront leur époque. Lors du salon des Arts Ménagers de 1953, Paulin expose un mobilier inspiré par l’esthétique nordique, découvert en Suède lors d’un récent voyage. Épurées, compactes et fonctionnelles, ses pièces ont pour objectif de plaire au plus grand nombre et de s’insérer dans de petits espaces, caractéristiques des appartements d’après-guerre. Il rencontre un grand succès qui lui vaut la couverture de la revue Maison Française. Cette soudaine, mais justifiée, notoriété, conduit tout droit Pierre Paulin chez Thonet, le célèbre fabriquant de la chaise de bistrot en bois courbé.

PIERRE PAULIN CM196 THONET

L’apprentissage chez Thonet

La société Thonet édite les premiers meubles en série de Pierre Paulin : le bureau CM178, la chaise CM196, ou encore la célèbre chauffeuse CM190. Ce mobilier aux lignes minimalistes et au design fonctionnel est avant tout, destiné aux collectivités. Mais il se retrouvera également dans des habitations résidentielles. Paulin utilise et teste toutes les nouvelles techniques de fabrication et les nouveaux matériaux mis à sa disposition : le contre-plaqué moulé, notamment pour les assises, et le formica que l’on retrouve sur certains de ses bureaux. En 1955, il dessine le fauteuil CM194 qui utilise un tissu «élastique» inédit, type jersey, pour le recouvrement et qui préfigure déjà la production de la prochaine décennie. Entre 1952 et 1958, Pierre Paulin suit un réel apprentissage au métier de designer, terme qui n’existe pas encore et dont il pose les jalons. Il y dessine quelques-unes de ces plus belles réalisations alliant rigueur et simplicité, dans un souci permanent d’adaptabilité à l’espace. Parallèlement à la collaboration avec Thonet, il produit quelques pièces chez l’éditeur français Meubles TV, plutôt destinées à l’habitat qu’aux administrations, comme sa banquette-lit, aujourd’hui rééditée par Ligne Roset. Parmi les modèles de cette période, une paire de chauffeuses CM 190 s’échange autour de 1500 euros dans la version en simili cuir d’origine, les bureaux CM178 et CM141 se trouvent régulièrement autour de 1500 euros pour le premier et quasiment le double pour le second. Pour une banquette-lit originale, comptez entre 4000 et 6000 euros, dans un état correct. Certains meubles, notamment les chaises, ont été édités à de nombreux exemplaires. Ils se chinent aisément sur les foires et les sites spécialisés.

PIERRE PAULIN BUREU CM141 THONET

La période Artifort

À l’aube des années 1960, l’histoire du mobilier vit un tournant. Les Français veulent de la couleur, des matériaux nouveaux, des formes arrondies, un peu de folie dans leurs intérieurs : le modernisme des années 1950 est dépassé. Face à ce changement radical, les commandes se raréfient pour Paulin. En 1959, André Simard (1926), proche de Paulin, présente ce dernier à Kho Liang Le (1927-1975), le directeur artistique de la société hollandaise Artifort. Le coup de foudre professionnel est immédiat. Les cadres d’Artifort décèlent tout de suite le caractère moderne et précurseur de Paulin ; ils signent avec lui pour une série de mobilier. Non seulement Paulin participe à la révolution des années 1960 dans le domaine de l’ameublement, mais il en est l’un des principaux acteurs. Il ressort des archives le fauteuil CM137 (créé chez Thonet, en 1952) qu’il renomme F156 ou « Oyster ». Mais surtout, il dessine le fauteuil F551 dit le «Big tulip » composé d’une coquille en hêtre moulé recouvert de mousse bultex et de tissu, complétée d’un piétement étoile. Une réussite devenue l’un des symboles des années pop! Jusqu’en 1975 s’en suivront de nombreux best-sellers dont le fauteuil F560 ou « Mushroom », modèle favori du créateur dans sa ré-interprètation moderne du célèbre fauteuil crapaud. Grâce à l’utilisation des nouvelles techniques de fabrication de coques moulées et à l’emploi du jersey (avec le fauteuil CM194), des pratiques amorcées chez Thonet, Paulin a pu proposer des assises inédites comme le fauteuil Tongue ou le Ribbon qui trônent dans de nombreuses collections de musée. Pour un fauteuil Mushroom original, comptez entre 900 et 2000 euros dans un très bon état, en fonction de la taille (petit ou grand modèle) et de la présence ou non d’un ottoman. Un Oyster trouve preneur autour de 1200 euros, rajoutez 300 euros pour un grand modèle. Le Ribbon est une pièce moins courante, particulièrement dans son tissu d’origine psychédélique de Jack Lenor Larsen, il vous en coûtera plusieurs milliers d’euros (vous aurez plus de chance de le trouver en galerie spécialisée).

CANAPE BLUB BLUN PIERRE PAULAIN

Le collectif AD SA

Maïa Wodzislawska, l’épouse de Pierre Paulin, et Marc Le Bailly, fondent, en 1967, l’agence AD, dont le but est de mettre en relation designers et industriels. De 1975 à 1990, Paulin rejoint l’agence devenue AD SA, et favorise la création industrielle en initiant des projets pour de grandes enseignes comme Allibert ou Calor. Paulin reçoit pour cette dernière, le Grand Prix national de la création industrielle, en 1987. Dans cette entreprise qui réunira jusqu’à cinquante personnes, Pierre Paulin s’épanouit difficilement. Il préfère le travail en petit groupe, voire en solitaire. Au-delà de la qualité de son travail et de son influence sur les arts décoratifs, Pierre Paulin est un créateur avant-gardiste qui a su vivre avec son temps. Il s’est adapté aux nouvelles techniques de fabrication et aux tendances, quand il ne les a pas initiées. Il est l’un des rares designers dont les créations ont traversé les époques.

Les commandes des présidents

Grâce à la modernité de son style, Pierre Paulin est choisi pour concevoir l’aménagement des appartements privés à l’Élysée du Président Pompidou, en 1971. Au programme, et en collaboration avec le Mobilier National, la salle à manger, le fumoir et le salon des tableaux. Pour ce dernier, une série de fauteuils et de canapés, de chaises et tables dites «trèfle» en référence à leur piétement, ainsi que des lampadaires, sont imaginés. Durant l’année 1971, quelques-unes de ces pièces sont éditées, à peu d’exemplaires, par Le Mobilier National, Alfa International (assises et tables trèfle) et par La Compagnie Verre Lumière pour les luminaires. Ce mobilier est très rare sur le marché de l’occasion, et recherché par les galeries et les collectionneurs fortunés. Les fauteuils et canapés sont réédités depuis quelques années par Ligne Roset dans des proportions et des finitions assez éloignées des originaux. Sollicité par le président Pompidou lui-même, Paulin dira de ce projet qu’il fût l’un de ceux pour lesquels il accorda le plus d’attention, réalisant des espaces à la fois poétiques et chaleureux. En 1984, c’est François Mitterrand qui fait appel à Pierre Paulin. Cette fois, il conçoit le mobilier du bureau du président. Nouveau défi et nouvelles contraintes, Paulin s’éloigne du côté moderne et onirique du mobilier Pompidou et se tourne vers un mobilier plus esthétique et élitiste. Il dessine donc des bureaux, des tables et le célèbre fauteuil à palmette en bois d’amarante édité par Le Mobilier National dont la cote se situe autour de 2500 euros. Ce mobilier prend place à l’Élysée à partir de 1988.

expo pierre paulin galerie jousse 2

Quid des rééditions ?

La majorité des grands classiques de Paulin des années 1960 sont réédités par Artifort depuis 2006. Les modèles sont très proches, avec parfois des housses zippées, notamment sur le Mushrooom ou le Ribbon. Certaines versions ont subi quelques liftings. Ces rééditions se trouvent régulièrement sur le marché d’occasion ; veillez donc à bien faire la différence entre une réédition et une version originale. Également, la société Ligne Roset a racheté les brevets de certaines pièces : le bureau CM141, le lit de repos, la chaise TV et le salon Pumpkin, entre autres. Si les matériaux semblent de qualité, les proportions, elles, sont parfois différentes des modèles originaux, spécialement sur le Pumpkin, revisité, ce qui permet aisément de le reconnaître dans cette version. On ne  soulignera jamais assez les avantages à favoriser l’édition originale à la réédition : l’esthétisme, la dimension historique, et l’aspect financier puisqu’une pièce originale bien achetée ne perdra pas de valeur.

À lire

Pierre Paulin, Un univers de formes Par Anne Chapoutot. Éditions Du May, 1992.

Pierre Paulin Par Élisabeth Védrenne et Anne- Marie Fèvre. Editions Dis Voir, 2001.

Pierre Paulin : Designer Catherine Geel. Archibooks, 2008.

Pierre Paulin : le designer au pouvoir Par Myriam Zuber-Cupissol, Catherine Geel, Arnaud Brejonde Lavergnée,Valérie Guillaume et Isabelle Tamisier- Vétois. Éditions RMN, 2008.

Pierre Paulin, L’homme et l’œuvre Par Nadine Descendre. Albin Michel, 2014.

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Expo PIerre Paulin Beaubourg

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REPERTORIO SOTTSASS @ ARTCURIAL – 23 Oct. 2018

Le 23 octobre 2018, pour la cinquième année consécutive, Artcurial propose une vente exclusivement dédiée au Design à l’occasion de la FIAC. Après Charlotte for ever consacrée à Charlotte Perriand l’année dernière, c’est au génie du design italien Ettore Sottsass que la maison consacrera ce nouvel opus.  Depuis la disparition de l’artiste en 2007, jamais son talent n’a été aussi célébré. La fantaisie et l’ironie joyeuse d’Ettore Sottsass ont marqué l’environnement créatif de la deuxième moitié du XXe siècle et est depuis une source d’inspiration inépuisable pour grand nombre de designers du XXIe siècle. En octobre 2018, le département Design choisit de consacrer une vente monographique au fondateur de l’influent mouvement Memphis. Avec une quarantaine de lots, Repertorio Sottsass propose un portrait inédit du créateur, explorant toutes les époques et tous les médiums dont il s’est emparé, du mobilier à l’émail en passant par la peinture, la céramique et le verre, offrant ainsi une vision complète de son vocabulaire créatif. Cette vacation dédiée à Ettore Sottsass préfigure la volonté d’Artcurial de donner une place plus importante au Design Italien, avec une vente consacrée entièrement à la spécialité en novembre prochain.

Si Ettore Sottsass incarne le design des années 1980, sa carrière debute bien plus tôt. Des œuvres intimes réalisées aux prémices de sa carrière, seront présentées lors de la vente. Ce choix répond à la volonté de retracer le parcours complet du créateur en ne négligeant aucun aspect de sa longue carrière. Plus rare aux enchères, et moins connues du grand public, ces œuvres des débuts éclairent sur l’évolution artistique du designer.

Dès les années 1950, Ettore Sottsass dessine, peint, travaille la céramique et surtout, débute une collaboration avec Arredoluce, dynamique entreprise d’éclairage italienne, installée à Monza, dans la banlieue de Milan. De cette collaboration naîtra par exemple une exceptionnelle suspension, réalisée en 1957. Proposée le 23 octobre pour une estimation de 50 000 – 70 000 € / 57 500 – 80 500 $, elle ne fut produite qu’à quelques exemplaires, tant sa fabrication était complexe : composée d’une coupole tronquée d’aluminium laqué venant masquer un réflecteur en perspex, cette pièce d’exception arbore une silhouette avant-gardiste qui met en œuvre des matériaux « modernes»…, un style atypique qui contribue à la renommée naissante du jeune designer. Sa collaboration avec Poltronova, qui débute à la fin des années 50, inspire Ettore Sottsass, qui crée en 1971 la série de meubles Mobili Grigi. Un ensemble singulier, determinant dans l’évolution du style de l’artiste qui souligne sa vision futuriste. Aujourd’hui devenues de véritables pièces de musée, nous proposerons au sein de Repertorio Sottsass
quelques unes des rares pièces demeurées en mains privées dont une bibliothèque en fibre de verre et résine, estimée 25000 – 35 000 € / 29 300 – 41 000 $.

Toujours au début des années 70, Ettore Sottsass s’associe à une autre maison italienne de luminaires, Stilnovo. C’est pour elle qu’il dessine d’étranges plafonniers nommées Manifesto. Elles se composent d’un tube d’acier chromé, existant en deux tailles et se terminent par un une sphère métallique rouge qui cache la source lumineuse. Pour Sottsass, il s’agissait de donner au mobilier un caractère architectural et de modeler l’espace en créant des bouquets de stalactites lumineuses. Un ensemble de quatre de ces plafonniers seront présentés à l’occasion de la vente Repertorio Sottsass, estimé 4 000 – 6000 € / 4 680 – 7 020 $ l’un.

En 1981, Ettore Sottsass fonde le goupe Memphis qui révolutionne le design, en en faisant un véritable phénomène médiatique tourné vers le visuel et le spectaculaire. Ce mouvement qui emprunte au Pop Art, fait appel pour ses créations à une large gamme de couleurs, de forme et de motifs. Conforme à la philosophie de Sottsass, le groupe Memphis ne s’impose pas de limite. Les pièces Memphis, produites en série limitées, sortent le meuble classique de l’ordinaire, sont une ode à l’esthétisme et à l’originalité, mais reste à l’époque réservés à une élite. La Coupe Sapho de 1986, créée en plein essort du mouvement Memphis, sera présentée pour une estimation
de 3 000 – 5 000 € / 3 450 – 5 750 $.

Dès 1959, la Galerie Il Sestante à Milan consacre aux céramiques d’Ettore Sottsass leur première exposition. Repertorio Sottsass proposera une pièce exceptionnelle issue de ce jalon capital dans l’histoire créative de Sottsass, une rare céramique de 1959 estimée : 35 000 – 45 000 € / 41 000 – 53 000 $, ainsi que d’autres pièces des décennies successives qui permettront d’appréhender de façon complète ce corpus captivant. Parallèlement à sa première exposition dans un musée français, au Centre Pompidou, en 1994, Sottsass est invité par la manufacture de Sèvres. Il y crée 14 pièces d’une extraordinaire originalité, poussant, comme à son habitude les limites du savoir-faire traditionnel de cette manufacture nationale. Repertorio Sottsass présentera deux pièces issues de la collaboration entre Sottsass et la manufacture de Sèvres, dont un vase Cozek de 2006, réalisé à l’occasion d’une seconde résidence de l’artiste entre 2005 et 2006
(estimation : 12 000 – 16 000 € / 14 000 – 19 000 $ ).

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« Si Sottsass est devenu, aujourd’hui, le synonyme du design des années 1980, sa carrière a débuté dès les années 1950 avec des dessins, de la céramique … Son travail d’artiste sera également présent dans cette vente car il infuse l’ensemble de son œuvre » Emmanuel Bérard, directeur Département Design, Artcurial.

Textes via Artcurial. Toutes les infos sur la vente ici.

Bio : JOE COLOMBO (1930-1971)

Joe-Colombo
Tour à tour peintre, architecte, designer industriel et inventeur, Joe Colombo (1930-1971) n’eut de cesse de créer et de surprendre dans un souci permanent d’améliorer et de faciliter notre quotidien. La notion de modularité le guida tout au long de sa carrière qui s’acheva brutalement à l’aube de ses 41 ans certainement à cause d’une vie menée tambour battant faisant de lui l’un des créateurs italiens les plus influents de sa génération. Il créa pour les plus grands éditeurs italiens à partir du début des années 60 lorsque qu’il décide d’entamer sa carrière de designer industriel, que ce soit du mobilier pour Zanotta et Flexform, ou des luminaires pour Kartell et Oluce entre autres. Toujours dans le but de simplifier la vie quotidienne, il s’attela, pendant la seconde moitié moitié des années 60 et en parallèle de son activité de designer, à la fabrication d’unités d’habitation multi-fonctionnelles dans la lignée des « casiers standards » de Le corbusier en 1920. Son âme de précurseur se manifesta également à travers l’utilisation de matériaux innovant que l’on découvre avec la chaise universale pour Kartell en 1967, la première assise pour adulte utilisant le plastique ABS moulé par injection, ainsi qu’avec le fauteuil Elda dont la coque est constituée de fibre de verre renforcée de plastique. Ce créateur futuriste marqua de son emprunte indélébile les 2 décennies de sa trop courte carrière, que ce soit en terme d’innovation que de dynamisme. Il mis à profit aussi bien l’artisanat italien que de grands éditeurs afin de produire des pièces au plus prêt de ses exigences, un personnage à part ainsi qu’un des meilleurs représentants du design utopique des années 60.
 
Les luminaires
 
Entre Joe Colombo et les luminaires, c’est une grande histoire d’amour qui débute en 1962 avec la lampe Acrilica qu’il dessine à quatre mains avec son frère Gianni Colombo (1937-1983) chez l’éditeur Oluce où il occupera d’ailleurs le poste de directeur artistique jusqu’en 1968 sous l’égide de Giuseppe Ostuni. L’Acrilica marque l’arrivée de Colombo en tant que designer dans le paysage milanais, et par la grande  porte puisqu’elle lui permet de remporter la médaille d’or à la XIIIème Triennalle de Milan en 1964. Cette lampe est composée d’un convecteur en plexiglas en forme de C complété d’une base en métal laqué contenant un tube néon permettant la projection de lumière, un modèle originale s’échangeant autour de 2500eur quand une rééddition est vendue 1800eur chez Oluce. Chez le même éditeur il produit également les célèbres lampes spider et coupé en 1967, pour lesquelles il sera gratifié de 2 prix : le Compasso de Oro et l’International Design Award. Ces modèles sont déclinés en plusieurs versions :  lampe de table, lampadaire, plafonnier, applique mural ou lampe à étau, elles reflètent parfaitement la recherche de la multi-fonctionnalité, chère à Joe Colombo, permettant de nombreuses variations de l’éclairage. Côté budget, les prix s’étalent entre 200eur et plus de 1000eur en fonction des versions et des coloris, les plus recherchées étant les bleues et les jaunes sachant que les blanc et les noirs sont rééditées.
A la même période, le designer milanais collabore avec l’enseigne Kartell et imagine une série de lampes à base de plastique dont les modèles KD24, KD27 et KD29, si les 2 dernières furent les plus répandues, la KD24 se distingue par une production plus faible ainsi qu’un système permettant de faire varier la diffusion de la lumière et d’obtenir un effet plus ou moins tamisé. Ces lampes à poser furent éditées peu de temps dans plusieurs couleurs, les prix variants en fonction de leur rareté, comptez entre 200eur et 600eur pour an ecquérir une pièce, le haut de la côté concernant les vertes, les jaunes et les violettes principalement. Notez que les KD27 et KD29 furent produites quelques temps en Australie dans des versions ayant l’abat-jour inférieur transparent avec une petit tirette reliée à la douille en guise d’interrupteur.
En 1970, il se rapproche de Stilnovo pour éditer sa lampe Topo qui peut être placée dans toutes les positions grâce à ses bras articulés ainsi que sa rotule multi-directionnelle sous l’abat-jour. La topo fut déclinée en lampe à poser, en aggraffe, en lampadaire ainsi qu’une version mini. Le prix d’une version ancienne s’évalue entre 150eur et 400eur.
LAMPE SHU JOE COLOMBO
Fauteuil Elda
 
C’est en 1963 que Joe Colombo imagine son célèbre fauteuil Elda, qu’il nommera ainsi en hommage à sa femme dont c’était le prénom. Produit par la société italienne Comfort seulement à partir de 1965, il s’agit du premier fauteuil de cette envergure à utiliser la fibre de verre renforcée de plastique, il s’inspire d’ailleurs des coques de bateau pour réalisé son imposante coque pivotante qu’il complètera de 7 coussins en cuir rembourrés conférant à cette assise une silhouette toute en rondeurs. Révolutionnaire en son temps, le fauteuil Elda offre un comfort et un plaisir d’assise incomparable, véritable « pièce dans la pièce », son dossier arrondi permet réellement de s’isoler du bruit environnant. Exposé au Musée d’Art Moderne à new-York (MOMA) ainsi qu’au Musée des Arts Décoratifs à Paris, ce fauteuil avant-gardiste fut mis à contributions dans plusieurs films et série pour son caractère futuriste et iconique, il apparait ainsi de façon récurrente dans la série d’anticipation « Cosmos 1999 » de Gerry et Sylvia Anderson entre 1975 et 1978, dans le film Hibernatus d’Edouard Molinaro en 1969, il accueil Benoit Poelvoorde pendant les 48 épisodes de la série télévisée belge « Les carnets de Mr Manatane » entre 1997 et 1998, et plus récemment il trône dans le premier tom du Blockbuster « Hunger Games » de Gary Ross au côté de Woody Harrelson. Une création de Colombo qui n’a pas pris une ride malgré les années et qui est aujourd’hui rééditée par la société Longhi en Italie avec une coque constituée de polyuréthane préformé. Pour une version originale, à la quelle il faudra préférer un cuir d’origine, il faudra débourser entre 4500eur et 6000eur pour un exemplaire en bel état dont la coque en fibre de verre n’a pas trop souffert avec un cuir bénéficiant d’une belle patine.
joe colombo elda
 
Le mobilier modulable
Parmi les plus beaux exemples de mobilier modulable produit par Joe Colombo, le meuble de rangement ou chariot Boby pour Bieffeplast et le sculpturale fauteuil tube pour Flexform sont très représentatifs. Tous 2 dessinés en 1969, le premier était principalement destiné aux architectes à l’origine, même si un usage domestique le démocratisera par la suite, ce petit meuble de rangement en plastique ABS injecté et monté sur roulettes possède des plateaux pivotant permettant un gain de place évidant et complète parfaitement une table à dessin ou un bureau. C’est un grand classique de Colombo qui fut édité en 3 tailles à des milliers d’exemplaires et donc assez rependu sur le marché de l’occasion, il vous en coutera pas loin de 150eur pour un exemplaire en bon état sans fêlure dans un coloris basic (noir ou blanc), comptez une centaine d’euros supplémentaire pour une couleur moins courante comme le jaune ou le vert. Notez qu’il est réédité aujourd’hui par la firme B Line au prix de 350eur, raison de plus pour privilégier une version d’époque. Le fauteuil tube quand à lui fut très vite hissé au rend d’icône du fait de son côté atypique, composé de 4 cylindres de différentes tailles pouvant être combinés via des joints d’assemblage en acier permettant de multiples combinaisons. On peut ainsi passer du petit fauteuil au la chaise longue ou bien à la version haut dossier avec quelques manipulations, le tout pouvant s’insérer les uns dans les uatres afin de tenir dans un sacs en toile jute prévu à cet effet. Niveau modularité, simplicité et rangement on n’a rarement fait plus bouti, cela résume assez les recherches de Joe Colombo pour le confort et la praticité était primordiales, même au détriment de la ligne (ce qui n’est pas le cas ici). C’est un principe qu’il développe lorsqu’il s’attèle à ses unités mobile d’habitation futuriste et qu’il développe l’idée d’anti design.
TOBU CHAIR JOE COLOMBO
 
La chaise Universalle
 
Initialement prévue pour être fabriqué en aluminium, elle fut finalement la première chaise pour adulte éditée en plastique ABS moulé par injection sous l’impulsion de la société italienne Kartell, véritable pionnière dans ce domaine. Dessinée par Joe Colombo en 1965, elle n’est disponible au grand public qu’à partir de l’automne 1967 suite à quelques soucis de productions dans la fabrication du moule à injection. La chaise universale est empilable par 3 et dispose de pieds démontable, l’idée originale étant de pouvoir varier les piètement pour des usage différents en fonction des besoins : chaises de bar, assise pour enfant, école, salle à manger, hôtel… bref un modèle pouvant être décliné à l’infini, une preuve supplémentaire du travail évidemment précurseur de Colombo. Cette icône de la période space-age et des aficionados de mobilier plastique est assez courante sur le marché de la seconde main,  vous pouvez en faire l’acquisition pour un prix se situant entre 50eur et 100eur en fonction de l’état. Notez qu’à l’époque, une version avec accoudoir fut développé mais elle resta malheureusement à l’état de prototype.
 
JOE COLOMBO UNIVERSALE CHAIR KARTELL
 
Les unités d’habitation fonctionnelles
 
Joe Colombo se consacre à la fabrication d’unités fonctionnelles à la fin de sa carrière, un projet qu’il avait déjà amorcé plus tôt en tant qu’architecte d’intérieur ainsi que dans l’aménagement de boutiques. C’est à ce moment là qu’il développe son idée d’Anti Design, estimant que « pour le designer, la relation entre l’habitation et le mobilier se fait toujours aux dépens de ce dernier », c’est ne quelque sorte l’aboutissement de ses recherches, il s’attache à oeuvre sa vision de l’habitat moderne et il en résulte des des cellules d’habitation individuelles futuristes et multi fonctionnelles destinées à faciliter la vie quotidienne, chaque pouvant se combiner aux autres pour former un appartement complet, il multiplie les rangements escamotables, les portes coulissantes et les systèmes tout intégrés. Le monde découvre un l’aboutissement de son travail amorcé sur le mobilier flexible et modulaire. Il tente de répondre de répondre au plus prêt aux besoins de ses contemporains, c’est ainsi qu’en 1968 la société Bayer demande à Colombo la conception d’un habitat futuriste pour la foire du meuble de Cologne : Interzum 1969 – Visiona 1. C’est son projet le plus aboutie ou il a pu exprimé nombreuses de ses expérimentations que ce soit en terme d’aménagement  mais également au niveau électronique avec les prémices de la domotique via un téléviseur intégré et un dispositif central de commande. Son habitat futuriste « Visiona 1 » fut par la suite présenté dans plusieurs autres villes européennes, plus qu’un designer Joe Colombo était un réel visionnaire, nulle doute que son travail résonne encore aujourd’hui chez de nombreux architectes avant-gardistes.
Joe Colombo Visiona 1969
Bibliographie :
Joe Colombo – Vittorio Fagone et Ignazia Favata – Minimum Design – 2011
Joe Colombo : Inventing the futur – Les Arts Décoratifs – Vitra Design Museum – 2005
Joe Colombo and Italian design of the sixties – Ignazia Favata – MIT Press – 1988
I Colombo – Joe Colombo 1930-1971/Gianni Colombo1937-1993 – Vittorio Fagone Mazotta – 1995
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BIO : PIERRE GUARICHE (1926-1995)

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C’est probablement le plus connu des designers français du mouvement moderniste des années 1950, en France. Le plus populaire aussi grâce à des pièces emblématiques destinées aux foyers modestes. Pierre Guariche, designer prolixe, nous laisse de nombreuses pièces, dans une large gamme de prix, avec une constante : la qualité.

Les canons de la guerre se sont tus ; la reconstruction du pays commence. Dès le début des années 1950, une jeune génération de designers modernistes émerge, avide de renouveau et à la créativité explosive. Le jeune Pierre Guariche (1926-1995) est un membre actif de la reconstruction au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Il allie la rationalité et l’élégance avec le souci permanent de s’adapter à l’espace pour toucher le plus grand nombre. Fervent acteur de la production série, il n’a de cesse de faire évoluer les techniques de fabrication pour répondre aux besoins de l’habitat. Diplômé de l’ENSAD en 1949, il fait ses premières armes aux côtés de Marcel Gascoin avant de travaillerpour les grands éditeurs de l’époque : Airborne, la Galerie Mai, Steiner, Les Huchers Minvielles, Meurop ou encore Disderot. Membre fondateur du célèbre Atelier de Recherche Plastique (ARP) de 1954 à 1957 et titulaire du prix RenéGabriel en 1965, Pierre Guariche est un personnage charnière au sein des arts décoratifs du XXe siècle.

Préfacto, les prémices

Alors âgé d’à peine 25 ans, il lance en 1952, le programme Prefacto sous l’égide de Charles Bernard, créateur des éditions Airborne. L’ensemble est composé d’une petite table basse, d’une chaise, d’un fauteuil et d’éléments de rangement modulables. Ce salon entièrement modulaire, l’un des premiers d’après-guerre, préfigure le mouvement moderniste. Édité par Airborne à l’origine, le brevet des meubles Prefacto est rapidement cédé à la Galerie Mai. Par la suite, cette dernière distribuera le mobilier de Guariche dans des versions en contre-plaqué afin de proposer des prix plus attractifs. Ces pièces sont peu courantes sur le marché de l’occasion, particulièrement les premières éditions Airborne très prisées des collectionneurs. Un fauteuil Préfacto s’échange autour de 5000 euros. Le prix de la rareté.

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L’aventure ARP

En octobre 1954, le trio Pierre Guariche, Michel Mortier et Michel-André Motte créé L’Atelier de Recherche Plastique (ARP). Il s’agit de proposer une offre large et variée, dans la lignée de ce que préfigure le mobilier d’après guerre, afin d’intéresser les éditeurs et les distributeurs. L’Atelier s’installe au coeur du quartier historique des artisans du meuble, faubourg Saint-Antoine, à Paris. Rapidement, les créations du groupe sont éditées : Steiner et Airborne pour les assises, Minvielles pour les rangements et Disderot pour le luminaire. Des références de l’ameublement de l’époque. L’Atelier de Recherche Plastique est consacré dès 1955, en emportant les deux premiers prix du Salon des Arts Ménagers, avec la salle de séjour et la chambre des parents. Alors que les designers développent leur propre identité chacun de leur côté et réalisent des projets personnels l’aventure ARP prend fin en 1957. Une petite enfilade ARP vaut entre 300 et 500 euros tandis qu’une belle assise refaite à neuf coûte près de 1000 euros.

La collaboration avec Airborne

La société Airborne et Pierre Guariche sont étroitement liés. Le designer, le premier à être édité par la firme de Charles Bernard, va signer en 1954, le célèbre fauteuil G1 qui restera au catalogue de l’éditeur jusque dans les années 1970. Il est constitué d’une simple housse en toile tendue reposant sur une structure métallique à section ronde laquée noir. Autre succès de leur collaboration, le mythique fauteuil G10, modèle intemporel, est composé d’une armature en contre-plaqué garnie de mousse et d’un piétement métallique tubulaire laqué noir. Le modèle est décliné dans une version rare, avec accoudoir en bois, ainsi qu’en banquette deux et trois places. Ce fauteuil, assez courant sur le marché de l’occasion dans sa version classique, s’acquiert aisément aux alentours de 600 euros.

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La maison Steiner

Tout le monde connaît la chaise Tonneau, surnommée Amsterdam. Avec la série Tulipe, elle est un classique des années 1950, née de l’association entre Pierre Guariche et la société Steiner. Toutes deux constituées d’une coque en fonte d’aluminium, en fibre de verre de verre ou bien en contreplaqué moulé souple, éventuellement complétées d’une galette d’assise ou entièrement recouvertes, les chaises sont évidées au centre. On reconnaît la Tulipe grâce à une ouverture plus grande. Idéales pour les petits espaces, ces chaises intemporelles fabriquées à de nombreux exemplaires trouvent leur place dans tous les intérieurs. Il est aisé d’en chiner, leur cote se situant autour de 200 euros pour une version en bois ou en fibre et 450 euros pour une version en fonte d’aluminium. Steiner a également édité les célèbres tables d’appoint carrées en mélaminé noir ou blanc dites «tables volantes». Elles sont également utilisées en tables de chevet ou en tables basses lorsqu’elles sont associées en série de trois ou de quatre. Un budget de 150 à 200 euros est nécessaire pour une table. Une version grand modèle, plus rare, existe avec une arrête de 60 cm au lieu de 40 cm.

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Les masterpieces

En parallèle des productions en série pour les firmes Airborne, Steiner ou Meurop, Guariche collabore de façon ponctuelle avec d’autres éditeurs pour lesquels il réalise des pièces produites à petite échelle appelées des «masterpieces». Ce sont
des meubles rares et très prisés des collectionneurs et des passionnés de design moderniste. Parmi ces créations d’exception, citons les chauff euses Courchevelle, éditées par Sièges Témoins, en 1962, le bureau Président chez Les Huchers Minvielles et la rarissime chaise longue dite «La vallée blanche» la même année. Cette dernière, inspirée de Le Corbusier et Bruno Mathsson, a été réalisée dans les ateliers de la fi rme Steiner avant d’être finalement éditée par Les Huchers Minvielle. Un parcours atypique pour l’unique exemplaire connu de cette pièce qui est actuellement en vente dans
une célèbre galerie parisienne. À bon entendeur….

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Les luminaires Disderot

Pierre Guariche est souvent qualifié de designer populaire en raison du prix accessible de ses meubles. Des tarifs bas grâce à une production en série par les firmes Airborne et Meurop. En revanche, le designer revêt son costume d’orfèvre quand il s’agit des luminaires édités, pour la plupart, par Pierre Disderot. Édités dans les années 1950, les lampadaires, lampes à poser, appliques ou plafonniers du diplômé de l’Ensad sont des icônes atteignant des résultats record en salle des ventes, au même titre que le mobilier de Jean Prouvé ou Le Corbusier. Dans ce domaine, le talent de Guariche s’exprime. Ses réalisations sont empreintes d’élégance et de légèreté, haussant Guariche au niveau des plus grands créateurs du XXe siècle. Parmi ses modèles phare, le lampadaire à double balancier G23 dit «equilibrium» est une pièce exceptionnelle, à mi-chemin entre la sculpture et l’éclairage d’intérieur. Ces oeuvres ont un prix : plusieurs milliers d’euros voire dizaines de milliers d’euros, sauf coup de chance du chineur.

Lampe agraffe G Pieerre Guariche Disderot

L’étape belge Meurop

Après l’expérience de l’Atelier de Recherche Plastique, Guariche prend la direction artistique du fabricant de mobilier belge Meurop. Il occupera le poste de 1960 à 1968. Pour toucher les foyers les plus modestes (n’oublions pas que dans les années 1950, la population française vit encore des moments difficiles), Guariche réalise du mobilier fabriqué industriellement, notamment les chaises coquillage en plastique moulé, à la fois légères et résistantes. Il imagine également, en 1959, pour Meurop, des pièces de qualité supérieure tel le fauteuil Calice. Sur le marché de l’occasion, le mobilier Meurop dessiné par Guariche est relativement accessible. Une petite enfi lade en contre-plaqué se trouve à partir de 300 euros. N’hésitez à chiner en Belgique où les prix sont plus doux et les pièces de Meurop, plus nombreuses.

Les rééditions

Pierre Guariche n’a malheureusement pas échappé à la réédition. La société Maison du Monde s’y est attelée depuis 2013 en reprenant une quinzaine de pièces du célèbre designer français avec plus ou moins de réussite. S’agissant pour la plupart de pièces relativement courantes du catalogue Guariche, il est conseillé d’opter pour des pièces vintage. Alors que les prix de ces dernières sont proches de ceux du neuf, l’intérêt historique et la cote d’une pièce vintage n’ont pas de commune mesure avec les rééditions. La cote d’un modèle original de Guariche ne s’effritera pas, voire se bonifiera, au fil des ans. Éternel débat entre le mobilier de designer original et les rééditions.

À lire

Pierre Guariche par Lionel Blaisse , Delphine Jacob , Aurélien Jeauneau. Editions Norma.
Airborne Par Pierre Deligny. Éditions Les Modernistes.
Steiner et l’Aventure du design Par Patrick Favardin. Éditions Norma.
Les Décorateurs des années 50 Par Patrick Favardin. Éditions Norma.

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Crédit photo : Galerie Alexandre Guillemain et  Artcurial.

BIO : VICO MAGISTRETTI (1920-2006)

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Tour à tour Architecte, urbaniste  et designer industriel, Vico Magistretti (1920-2006) a marqué de son emprunte les arts décoratifs du XXème. Son travail novateur caractérisé par une évidente recherche de simplicité et de rationalisme fut  valorisé chez les plus grands éditeurs italiens tels que B&B Italia, Fontana Arte, De Padova, Cassina, Oluce, Artemide ou Kartell. Il mis à disposition ses talents d’architecte pour la reconstruction d’après-guerre pendant les années 40 avant d’épouser la décennie suivante une grande carrière de designer industriel initiée par la chaise Carimate pour Cassina. Sa quête de la forme épurée se traduit par des créations aux formes géométriques empruntes de fonctionnalité, l’usager restant toujours au cœur de ses préoccupations.

LES 1er PAS EN TANT QUE DESIGNER INDUSTRIEL : LE FAUTEUIL CARIMATE

A l’aube des années 60, Vico Magistretti est encore occupé casiment à temps plein en tant qu’architecte et urbaniste lorsque qu’il se voir confier le projet d’aménagement du restaurant du Club House de Carimate en Italie. Ne trouvant pas le type d’assises qu’il cherchait chez les différents éditeurs de mobiliers de l’époque, il décide de dessiner les assises lui-même en s’inspirant des fauteuils de campagne traditionnels en bois et cannage.  Dans la foulée, il fait la rencontre de Mr Cesare Cassina, fondateur de l’éditeur éponyme, qui essaye le fauteuil et lui lance « Magistretti, pourquoi ne pas produire cette chaise? ». C’est ainsi que débuta une très longue collaboration entre les 2 hommes et que fut lancée la carrière de designer industriel de Vico Magistretti. Pour les chineurs comptez entre 150 et 250eur pour l’achat d’un fauteuil ou d’une chauffeuse Carimate mais attention à bien vérifier l’état du cannage.

LE PLASTIQUE AVEC ARTEMIDE

Magistretti entame un long partenariat avec le milanais Artemide à partir  1962, il en ressortira une série de lampes aussi ingénieuses qu’iconiques comme la lampe Eclisse, la Dalù, la Telegono ou bien les appliques Téti. Il dessinera également du mobilier en profitant de l’avènement du plastique moulé et de la fibre de verre comme standard  dans les années 60, c’est ainsi qu’il imagine la gamme de tables Démétrio et les chaises Selene. Pendant toute cette décennie, il s’affirme  clairement comme un acteur incontournable dans le paysage des designers italiens ayant une reconnaissance internationale en pleine période « space-age ».

DIRECTEUR ARTISTIQUE CHEZ OLUCE

En 1968, Magistretti succède à Joe Colombo en devenant le nouveau directeur artistique du plus vieil éditeur de luminaires italiens encore en activité : Oluce. Cette collaboration durera plus de 20 ans et donnera naissance à quelques-uns des plus grands classiques du design en terme du luminaires  comme la série des lampes Snow en 1973, les lampes Melilla en 1978 ou bien la lampe Atollo en 1977, synthèse à elle seule de toutes les facettes du travail de Vico Magistretti en qualité de designer. Les lampes Snow existent en 3 déclinaisons : suspension, lampe à poser et lampadaire, vous pourrez en trouver chez des marchands spécialisée entre 300 EUR pour la première et 1200 à 2000 EUR pour les suivantes.

LES ANNEES 80

Alors que les années 80 voient l’avènement de nouveaux concepts dans le design industriel, notamment avec l’émergence du groupe Memphis sous l’égide d’Ettore Sottsass, Michel de Lucchi et Andrea branzi entre autres, Vico Masgitretti ne déroge pas à ses préceptes de simplicité et de fonctionnalité. Il ne cède pas aux sirènes d’un design trop orienté vers la mode et le Pop Art derrière lesquels la fonctionnalité s’efface, et dessine la canapé Sindbad pour Cassina en 1981, la table Vidun pour De Padova en 1986 ou encore la lampe Slalom pour Oluce en 1985. Il s’attachera avant tout à l’usage qu’en aura l’acheteur ainsi qu’à une certaine tradition dans l’histoire du design, leighmotiv qui l’animera tout au long de sa carrière qui s’achèvera à sa mort en 2006. Il résumera son travail ainsi : « Pour moi, dessiner, ce n’est pas reproduire l’objet dans tous ses détails morphologiques et techniques. C’est un moyen de creuser plus en profondeur, pour trouver et exprimer l’âme, l’essence de l’objet, ou mieux définir cette autre réalité possible qui existe derrière la réalité visible. »

VICO MAGISTRETTI 4

magistretti eclisse

PIECES ICONIQUES :


LAMPE ECLISSE – ARTEMIDE 1965

Magistretti dessine la lampe Eclisse pour l’éditeur italien Artemide en 1965, il s’inspire des lanternes traditionnelles et utilise une demi-sphère en métal laqué afin de pouvoir réguler la lumière pour créer différentes atmosphères jusqu’à atteindre « l’éclipse ». Une création d’une apparente simplicité qui est toujours éditée aujourd’hui chez Artemide et pour laquelle Magistretti remporta le Compasso de Oro à la XIV triennale de Milan en 1967. Cette lampe se trouve assez facilement sur le marché de l’occasion étant donné le nombre de pièces fabriquées depuis sa création, vous pourrez en acquérir un exemplaire entre 80 et 120 EUR en fonction de l’état bien entendu et du coloris.

CHAISE SELENE – ARTEMIDE 1969

En 1969, la chaise Selene fait partie des premières chaises en fibre de verre et plastique moulé, au même titre que la chaise universal de Joe Colombo ou bien de la « S chair » de Verner Panton. Toutes 3 empilables, elles utilisent les toutes nouvelles de techniques de fabrication de l’époque et augurent de que sera le mobilier des années 60 tant au niveau des formes que des couleurs pop. C’est Enesto Gismondi, alors directeur d’Artemide, qui, au retour d’un voyage en Allemagne, soufflera l’idée à Magistretti d’utiliser ces nouveaux procédés. L’année suivante, ce dernier déclinera la Selene en 2 autres versions : le fauteuil Gaudi et la chauffeuse Vicario, le prix de ces assises se situant autour de 200eur la pièce quelque-soit le modèle.

LAMPE ATOLLO – OLUCE 1977

Il s’agit peut-être du plus grand best-seller de Vico masgistretti, si ce n’est en terme de ventes, du moins en terme d’image. La lampe à poser Atollo, fruit de la collaboration entre Magistretti et l’éditeur italien Oluce, sort en 1977 et remporte un Compasso d’Oro en 1979, on retrouve toute la démarche du créateur milanais dans cette lampe : la simplicité, la perfection des proportions, la géométrie des lignes, ainsi que le maitrise de la diffusion de la lumière. On retrouve ici tous les thèmes chers à Magistretti qui ne s’encombrait pas de fioritures afin d’aller directement à l’essentiel, ceci allant de paire, dans le cas présent, avec une certaine complexité dans la fabrication. Actuellement rééditée chez Oluce, cette lampe sculpturale existe en 3 tailles : 35cm, 50cm ou 70cm, comptez environ 700 EUR pour un grand modèle d’occasion.

CANAPE SINDBAD – CASSINA 1981

Relatif échec commercial à sa sortie en 1981 chez Cassina, la gamme Sindbad, composée d’un canapé et d’un fauteuils déclinés en 2 hauteurs de dossiers, n’en reste pas moins une des créations favorites de Magistretti pour la périodes 80s. Constituée d’un châssis métallique complété de 4 pieds en hêtre teinté noir, la structure est tout simplement recouverte d’un grand couvre-lit en laine gansé de tissu épais rappelant les couvertures de chevaux chères à nos voisins anglais. Un modèle original et coloré, doté d’un rare confort, représentatif des  nouvelles directions que prend le design dans les années 80. L’apparente simplicité du dessin confère à la pièce une certain côté nonchalant, ceci allant à contre-courant du « néodesign » de cette époque, porté par les éditeurs Memphis et Alchimia avec en chef de file Ettore Sottsass et Alessandro Mendini. Les canapés et les fauteuils Sindbad sont assez difficiles à trouver car peu édités en leur temps suite à la faible demande, ce qui ne les empêche de rester abordables, un sofa s’échange entre 800 et 1200 EUR alors qu’un fauteuil trouvera preneur pour 400 EUR. 

BIBLIOGRAPHIE :

Vico Magistretti – Vanni Pasca – Thames & Hudson 1991

Made in Cassina – Giampiero Bosoni – Flammarion 2009

L’utopie Du Tout Plastique – Fondation pour l’Architecture – 1994

Oluce – Thomas Brauniger – Les Luminaires Modernistes – 2015

Fondation : www.vicomagistretti.it

telegono magistretti artemide

vico magistretti sindbad cassina

ALAIN RICHARD 1926 – 2017

Alain Richard nous quittait le 4 aout dernier, voici quelques éléments biographiques et historiques de ce créateur français des Trente Glorieuses rédigés par la Galerie Pascal Cuisinier. La galerie avait organisé la première exposition monographique en 2009 et possède une collection unique de ses meubles et luminaires. Elle prépare pour très bientôt nous l’espérons une grande rétrospective et sans doute un second ouvrage monographique.

Elève de René Gabriel, sorti major de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs en 1949, fondateur de son bureau d’études dès 1952 avec son épouse la talentueuse créatrice de tissus Jacqueline Iribe, puis de sa propre Agence en 1971, Alain Richard s’imposera très vite comme l’un des plus brillants représentants de sa génération.

Né en Bretagne, dans les Côtes du Nord, et amoureux de la mer et des bateaux, il rêve dans un premier temps d’une carrière dans la Marine Nationale, mais sa santé fragile et ses talents précoces l’orientent très tôt vers d’autres voies… A la fin de ses études secondaires, au vu de ses évidentes dispositions, son professeur de dessin l’incite à entrer à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs, à Paris. Bien qu’hésitant encore entre peinture et architecture, plus enclin à travailler la couleur que le volume, il opte pour cette formation reconnue comme la plus aboutie de l’époque.

La naissance du style Alain Richard

A Paris, il fonde en 1952 son propre bureau d’études avec sa femme Jacqueline Iribe, créatrice de textiles d’ameublement parmi les plus talentueuses de sa génération, dont le style résolument contemporain séduira la Maison Knoll International. Ses créations se démarquent de l’esthétique dominante et annoncent les partis pris de la décennie suivante.

Au Salon des Arts ménagers de 1954, il expose un ensemble très remarqué de chambre à coucher édité par Lavrieux : un soin tout particulier est porté à l’éclairage, en partie indirect ; les jeux de matériaux sont renforcés par des aplats de couleurs qu’animent les tissus de Jacqueline Iribe ; l’utilisation systématique des tubes métalliques peints en blanc pour les lampes comme pour les meubles apporte une fraicheur nouvelle à l’ensemble dont la modernité est encore appuyée par la présence d’agrandissements photographiques.

Alain Richard deviendra l’un des tout premiers designers français, incarnant cette nouvelle génération que Solange Gorse, rédactrice en chef de La maison Française, quali e alors de « génération des jeunes loups » au vu de son enthousiasme, de sa vitalité et de sa capacité à rivaliser avec les productions scandinaves ou américaines tout en conservant les qualités d’un style proprement français.

Parmi ces « jeunes loups » : Pierre Guariche, Joseph- André Motte, Michel Mortier, André Monpoix, Antoine Philippon et Jacqueline Lecoq, René Jean Caillette, Pierre Paulin… Ils connurent la reconnaissance tout au long de trois décennies, mais s’effacèrent quelque peu de la mémoire collective dans les années 80-90 ; ils font désormais l’objet de redécouvertes à l’instar de Pierre Paulin.

Des commandes prestigieuses

Avec Pierre Paulin, Alain Richard est le designer de sa génération qui recevra le plus grand nombre de commandes du Mobilier National dans les années 70… Il est notamment chargé de l’aménagement de la préfecture des Hauts de Seine, des tribunaux de grande instance de Nanterre et d’Annecy, de la nouvelle Ambassade de France à Moscou, du ministère de l’eau et de l’énergie au Gabon, de la banque d’état du Cameroun, ainsi que de nombreux chantiers pour les ministères des affaires étrangères, de la Santé, des postes et des télécommunications, des Affaires Culturelles…

Il participe par ailleurs au chantier du réseau RER à Paris, notamment la station Auber.
A partir de 1977, il devient un spécialiste des musées : il en concevra une vingtaine. Parallèlement, il travaille pour des groupes hôteliers, des complexes de sports d’hiver, ainsi que pour la BNP qui lui confie des agences de prestige aux quatre coins du monde et sa nouvelle image de marque.

Un parcours ponctué de nominations et de récompenses.

En 1964, Alain Richard est chargé de conférences par le ministère des affaires culturelles, auprès des élèves de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs. Il continuera d’enseigner jusqu’à la n des années 70, accordant une grande importance à cette activité. En 1967, il est nommé membre de la commission d’études pour la création architecturale, au ministère des affaires culturelles, et devient, en 1969, membre du comité chargé de donner son avis sur les questions concernant la création dans le domaine des arts graphiques et plastiques et des rapports de l’état avec les artistes.

Parmi les récompenses, lui reviennent : le grand prix de l’exposition universelle de Bruxelles (1958), la médaille d’or de la Deutsche Handwerks Messe de Munich (1960), la médaille d’or de la S.E.A.I. pour les ensembles et l’architecture intérieure (1961), le prix René Gabriel (1964)…

ALAIN RICHARD TV-ensemble 802